De la maladie elle-même.
Détection épidémiologique et dénomination :
Nous sommes au printemps (Avril 2009) dans l’hémisphère nord et en automne dans l’hémisphère sud.
Depuis plusieurs jours, les médias évoquent une grippe exotique dite « grippe mexicaine » parce que c’est là-bas que tout aurait commencer, depuis la mi-mars. Mais à l’origine, la grippe est « porcine », parce que son foyer viendrait de porcheries industrielles du Mexique.
Le 30 Avril 2009, l’OMS affinant encore son analyse, décide de la dénommer « grippe A H1N1 ».
Le 11 juin 2009, l’OMS déclenche le niveau 6 de l’alerte, seuil de la Pandémie (nombre de cas et dissémination dans le monde).
Cette appellation répond a plusieurs exigences : affiner la nature exacte du virus, ne pas stigmatiser un pays (le Mexique, formula une demande de Dommages et Intérêts à la Communauté Internationale) mais aussi ne pas porter atteinte à l’activité économique porcine ou faire référence à une pandémie « historique » car meurtrière, entraînant une psychose planétaire (grippe espagnole de 1918, grippe de Hong-Kong de 1968).
Et je vous passe les messages « millénaristes », sectaires en tout genre, rappelant ceux de la « grande peste »…
Profil épidémiologique de l’infection et alerte à la pandémie :
Les malades présentent un syndrome respiratoire aigü et contagieux de la famille des grippes se manifestant par des courbatures, des maux de têtes, des fièvres plus ou moins sévères, des difficultés respiratoires.
Sa particularité qui inquiète les scientifiques, les médecins et les gouvernements, est génétique. Il s’agit d’une combinaison d’éléments caractéristiques des grippes porcine, aviaire et humaine.
Le Dr Anne Schuchat (Centre de contrôle et de prévention des maladies des États-Unis (CDC)), a déclaré que les cas américains résultent d’un virus caractérisé par une recombinaison d’éléments génétiques provenant de quatre virus différents :
une grippe porcine nord-américaine, une grippe aviaire nord-américaine, une grippe humaine du type A du sous-type H1N1, et un virus de grippe porcine typiquement trouvé en Europe et en Asie, soit « un mélange exceptionnel et jamais rencontré ni aux États-Unis, ni ailleurs, de séquences génétiques ».
Et surtout, elle est transmissible d’Homme à Homme.
Concernant la nature porcine du virus, tout vient du fait qu’un grand élevage industriel de porcs, situé à La Gloria dans la région de Perote, dans l’Etat de Veracruz, est suspecté, par la population locale fortement touchée et les autorités environnantes, d’être à l’origine de la pandémie. Ces suspicions reposent en partie sur l’existence d’une polémique concernant un non-respect des normes sanitaires par les fermes industrielles, ce qui aurait causé un début d’épidémie. Les autorités mexicaines pensaient avoir trouvé le « patient zéro » : Edgar Hernandez, malade fin mars d’un cas avéré de H1N1. Toutefois, le 30 avril, le centre de contrôle d’Atlanta publie un rapport sur un autre cas au Mexique ayant développé le virus mi mars, soit 15 jours avant Hernandez.
La critique tourne à la polémique et un blog s’en fait l’écho. Malheureusement, l’actualité qui se focalise maintenant sur le risque mortel et le vaccin ne s’intéresse plus au risque que peut représenter la mauvaise maîtrise sanitaire dans un élevage industriel.
De ses conséquences pour le monde.
Conséquences sanitaires :
La pandémie est une épidémie qui s’étend en un temps record à l’ensemble de la planète. C’est-à-dire que son pic (élévation de cas le plus fort à un temps donné avant de régresser) est identique, quelque soit l’endroit où l’on se trouve, à la différence d’une épidémie qui se développe en un lieu avant de se déplacer selon le rythme des saisons et les migrations des populations.
Sa particularité est de se transmettre très rapidement, très facilement (par effet aérosol) alors que sa dangerosité n’apparaît pas clairement. Par contre dès le début, le monde médical s’inquiète de sa capacité à muter, à se recombiner et surtout à résister aux traitements.
Sa capacité de « nuisance » est encore mal évaluée. Les spécialistes parlent de la « létalité » de la maladie, le taux de décès pour x% de cas déclarés, répertoriés.
La mortalité a deux origines : la gravité de l’infection et la capacité des services sanitaires à réagir (accès aux médicaments, en volumes et en capacité économique pour les malades ainsi que l’accès aux structures médicales, de la même manière).
Madame Chan, directrice générale de l’OMS s’en est inquiété dès que la pandémie est apparue dans les cas chiffrés.
Les pays pauvres sont bien moins armés pour faire face et participer à la lutte mondiale.
Cette capacité à faire face participe à l’évaluation des phases de 1 à 5 ou 6.
La grippe « commune » ou parfois appelée « saisonnière », possède une morbidité forte, elle touche entre 5 % et 15 % de la population totale et son taux létal est de 0,2% à 0,5%.
Il faut se rappeler qu’une grippe saisonnière « normale » provoque l’hospitalisation de 1000 à 5000 personnes, et en tue entre 400 et 1000; si 2000 personnes succombent, on dit simplement qu’elle a été particulièrement virulente.
L’épidémie de Madagascar de 2002 (grippe A H3N2) fait 754 morts sur 30 304 cas notifiés, soit 2,48% de décès.
Pour freiner la propagation, les diverses autorités sanitaires et gouvernementales annoncent des portiques à détections thermiques aux sorties des aéroports, la commande de masques, de médicaments et de vaccins, des plans pour accueillir les malades dans les hôpitaux…
Il est aussi décidé de la fermeture de lieux très fréquentés, ou accueillant un public particulièrement vulnérable, favorisant la propagation du virus.
Les mesures d’hygiène élémentaires sont rappelées aux populations (au Nord parce qu’elles ont perdues l’habitudes de les pratiquer, confiantes dans les médicaments et peu exposées aux risques sanitaires, au Sud parce qu’elles n’ont pas accès aux soins, trop coûteux ou trop éloignés, parce qu’elles les ignorent, par défaut d’éducation, ou parce qu’elles n’ont pas accès à l’eau potable) : usage du savon, de l’eau bouillie, des mouchoirs jetables, du port de masques, la cuisson des aliments…
Conséquences sociales :
La mortalité pour ce type de pandémie serait, selon des projections statistiques, de 100 décès pour 100 000 habitants, soit 0,1%, alors que les ratios calculés d’après les chiffres fournis par la presse varient de 0,3% à 0,4°/00 .
Mais depuis quelques jours, la Suisse et la France, comme d’autres pays avant eux, ne comptent plus systématiquement les cas. Ne sont dépistés que ceux présentant des risques de complications, sans parler des cas « supposés », à défaut d’analyses complètes, au motifs que « tout laisse à penser que cela en soit »…
Contrairement à une grippe normale, le virus A H1N1 touche non pas les personnes âgées, sans doute immunisées par un virus antérieur qui présentait des similitudes avec celui-ci, mais les 30 – 60 ans, soit la population active. Les enfants de 0 à 5 ans, plus fragiles, sont également exposés, de même que les femmes enceintes, dont les défenses immunitaires sont amoindries.
De même, si la grippe A H1N1 a un peu la même dispersion et des caractéristiques similaires à celle de 1918 (grippe espagnole), les connaissances médicales et les conditions de vies ont évoluées … C’est ce qui se dit pour rassurer, mais le virus, lui, peut toujours muter, sans prévenir.
Après les tentatives pour s’approvisionner en Tamiflu, au risque de créer des résistances au traitement, le citoyen Lambda confie son sort aux injections du vaccin à venir, confiant.
A-t-il raison ?
Rien n’est moins sûr.
Je vous passe les cas d’intolérance de certains à des composants du vaccin ou les refus idéologiques d’autres, de recevoir les injections…
Un professeur de médecine s’inquiète de la pertinence du décompte, de la traçabilité et de l’efficacité des mesures curatives… dans des pays « riches ».
Je vous laisse envisager les mêmes problèmes dans les pays « pauvres »…
Nous faisons face à une situation trop nouvelle pour avoir des certitudes. Le virus est le résultat d’une recombinaison de trois souches. Il peut encore se recombiner avec la souche de la grippe saisonnière alors qu’arrive l’hiver austral, qu’il faut des mois pour décrypter une carte génétique, trouver une parade puis mettre en production le vaccin et le diffuser.
Décidément, il va falloir éviter les lieux trop fréquentés et vivre avec les solutions désinfectantes, les masques, bref, revoir nos modes de vie.
Mais sommes nous prêt à entendre, comprendre et appliquer ce message ?
Conséquences économiques :
«Des centaines de milliers de personnes actives atteintes sur de courtes périodes, cela va profondément influer sur la bonne marche des entreprises. Sur le site de l’OFSP, les recommandations du Secrétariat d’Etat à l’économie (SECO- Suisse) listent les dispositions prendre en termes de rationalisation de la production, télétravail, rappel de retraités ou suppression temporaire de temps partiels pour compenser les employés alités, ou au chevet de leur famille, ce qui peut représenter de 25 à 40% de l’effectif.» selon un article de la Romandie.
La crise économique couplée à une réelle pandémie pourrait avoir des conséquences incroyables pour la bonne marche des entreprises et du monde des affaires…
L’Argentine subit ce nouveau marasme économique avec un fort taux d’absentéisme et des secteurs entiers atones.
Le monde, tel que nous le connaissons, est en équilibre instable.
Conclusions sociologiques et politiques.
« Depuis quelques jours, en Suisse, comme dans les autres pays, on ne compte plus systématiquement les malades, et ne sont dépistés que les cas à risques de complications.»
« En France, sur le total de 464 cas, 114 sont dits « probables » d’un point de vue épidémiologique mais n’ayant pas fait l’objet d’un prélèvement pour confirmer formellement la présence du nouveau virus. Les autres sont des cas « non confirmables ». » fin de citations.
Ce genre de déclarations me laisse abasourdie !
Est-ce pour de sombres raisons économiques et de maintien de la croissance que progressivement, le monde politique chercherait à édulcorer la gravité de la situation ?
Pour ne pas nuire à la mauvaise marche de l’économie mondiale, mieux vaudrait donc laisser vivre dans l’insouciance les gens et risquer une mort prématurée et pandémique plutôt que de maintenir la vigilance auprès des vacanciers transhumants.
A moins qu’il s’agisse d’occulter l’inefficacité de mesures de prévention ou de confinement dues à la nouveauté de la situation. Ce genre de polémique a déjà eu lieu en Amérique Latine à cause d’élections importantes pour le pouvoir en place…
Toujours est-il que l’ampleur des cas efface les individus au profit des statistiques et des projections mathématiques… Déshumanisés, les chiffres font moins peurs, éloignent le sens du risque sanitaire et des précautions à prendre. Par contre pour trouver les ratios établissant le taux létal par rapport à la grippe « ordinaire », tout devient plus compliqué.
En un mot comme en cent, prenons-nous bien conscience de l’ampleur du problème ?
Ne serait-il pas temps d’envisager, en vertu du principe de précaution qui semble pour le coup remisé au placard, une application plus rigoureuse du niveau 6 prévu par l’OMS. Nos dirigeants n’ont pas su anticiper la venue de la crise économique, seront-ils alors capables de faire prévaloir des mesures de santé publique qui s’imposent de plus en plus comme nécessaires (c’est vrai qu’ils n’ont pas l’habitude d’être confronté à ce type de risque sanitaire cf. été caniculaire 2003) face à de prétendus intérêts économiques ?
Mamouchka.
Présentation générale :
http://fr.wikipedia.org/wiki/Grippe_A_(H1N1)_de_2009
Grippe et accès aux soins dans les pays :
Appellations variables, décomptes et conséquences économiques :
http://www.liberation.fr/societe/0101579372-h1n1-prend-ses-quartiers-d-ete
http://www.lematin.ch/actu/suisse/grippe-h1n1-dispersion-1918-142788
http://www.rue89.com/explicateur/2009/04/29/la-grippe-h1n1-est-elle-porcine-ou-mexicaine
Blogs et controverses sur les méga porcheries :
http://www.mondialisation.ca/index.php?context=va&aid=13696
Les autres grippes :
La grippe aviaire, site Futura-sciences
Les uns et les autres se périmant au bout de quelques années, on imagine le coût lié au maintien du « principe de précaution » poussé à ce niveau. Jean-Jacques Jégou a ainsi calculé que pour renouveler le stock d’antiviraux, il fallait débourser la coquette somme de 24 M€/an. Et que dire du gâchis…
Que penser de tout cela ? Principe de précaution poussé à l’excès, ou principe de précaution alibi, servant de prétexte à des motivations beaucoup moins avouables ? Au moins Roselyne Bachelot a-t-elle accepté le principe d’une enquête parlementaire…
Le temps ayant fait son œuvre, des voix s’élèvent pour remettre en cause au sein de l’OMS le passage à la phase 6, après modification des critères… pour lancer de façon automatique le lancement des commandes par les Etats auprès des laboratoires pharmaceutiques…
Pour en savoir plus :
Notion de pandémie:
http://fr.wikipedia.org/wiki/Pand%C3%A9mie
http://sante-plus.org/728-enquete-sur-la-gestion-de-la
La commission d’enquête parlementaire :
http://elianeassassi.fr/Il-faut-lever-le-voile-sur-la-gestion-d-une-pandemie-fantasmee.html
Mamouchka.